La gloire du Bavarois Carl Orff (1895-1982) se résume à une seule
œuvre : les Carmina Burana (Chants de Beuren en latin), un
gigantesque oratorio pour solistes, chœurs et orchestre inspiré par des poèmes
d’amour médiévaux. C’est le premier morceau de l’œuvre qui est resté
particulièrement célèbre et il n’est pas rare de l’entendre au cinéma ou à la
télévision. Intitulé O fortuna, il se
caractérise par sa puissance sonore. Celle-ci est obtenue par un traitement
homophonique du chœur et de l’orchestre, auquel s’ajoute un climat à la fois
mystérieux et épique. Le reste de l’œuvre est dans la même veine : force,
répétitions qui visent à l’envoûtement de l’auditeur, thèmes simples rythmés
par une percussion abondante.
Tout cela sonne très « völkisch », au sens national-socialiste
du terme. Pas étonnant : les Carmina
Burana furent repris par les Nazis, qui y voyaient l’idéal de l’art aryen.
Orff n’est d’ailleurs pas totalement étranger à cet état de fait : sympathisant
du NSDAP, il connaissait Joseph Goebbels (le ministre du Reich à l’Education du
peuple et de la Propagande JDLR) et s’acquitta parfaitement de sa tâche de
compositeur officiel du IIIème Reich.
Pour couronner le tout, Orff était particulièrement arrogant, n’hésitant
pas à se qualifier lui-même de « plus grand compositeur du XXème
siècle » (exit Stravinsky, Prokofiev, Sibelius, Chostakovitch…). A sa
décharge, il mit au point une ingénieuse méthode d’apprentissage de la musique,
basée sur le rythme et les percussions. Toujours employée en Allemagne, cette
méthode a permis à des milliers d’enfants d’apprendre le langage musical. Mais ce
succès n’efface pas l’attitude d’Orff pendant la guerre, tout à fait
scandaleuse (il alla jusqu’à ignorer les appels à l’aide de ses connaissances
« déviantes »).
Il n’empêche que j’écoute toujours les Carmina Burana avec plaisir et fascination, emporté par la
puissance brute de cette œuvre hors-norme. Mettez donc vos scrupules
idéologiques de côté (si toutefois vous en avez) et laissez-vous tenter à votre
tour par l’envoûtante cantate de Carl Orff. Je vous garantis qu’elle vaut le
détour.
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