« Et il vint près du lieu où j'étais, et à
sa venue je fus épouvanté et je tombai face contre terre, et il me dit :
comprends, fils d’homme, que la vision est pour le temps de la fin. »
C’est de cette citation du livre de Daniel (chapitre
8, verset 17), que Rued Langgaard – compositeur Danois et
quelque peu mystique – a tiré le sujet de son
unique cantate, intitulée Edens tid (Fin des temps en français). Composée
entre 1939 et 1943, cette œuvre n’est pas un travail original mais reprend quelques
extraits de L’Antéchrist, un opéra que
le compositeur avait conçu vingt ans plus tôt.
Rued Langgaard dans les années 1940 |
L’introduction de la cantate est plutôt ample et purement
orchestrale. Elle correspond au prélude de l’opéra et instaure un climat de
mystère, grâce à une harmonie statique et de nombreux pizzicatos, que rehaussent
les interrogations des trompettes. Cette musique laisse l’impression d’une
menace insidieuse bien que solennelle. Du reste, elle représente bien l’état d’esprit
de Langgaard, musicien misanthrope et qui détestait le monde moderne.
Le second mouvement est intitulé Endens Tid. Il résume le premier acte de l’opéra, qui voit l’Antéchrist
prendre le pouvoir sur le monde et imposer sa domination. Comme dans la
tradition chrétienne, il est accompagné de la Grande Prostituée de Babylone.
Mais alors que les humains s’adonnent à un hédonisme
peccamineux, l’heure du Ragnarök sonne dans un fracas de cuivres et de
percussions. Malgré les cris et les supplications des chœurs, l’Antéchrist se
révèle incapable d’empêcher l’Apocalypse. Son pouvoir se brise sur les
prophéties scandinaves, dans un tourbillon orchestral.
Le titre du dernier mouvement est assez explicite
puisqu’il s’intitule Katastrofen... Il représente le chaos de la fin des temps,
dans lequel l’Antéchrist et le monde sont détruits. Sur le plan musical, l’atmosphère
se rapproche de l’introduction, avec des sonneries de cloches aux effets pour
le moins ténébreux. La fin de la cantate est plus calme (telle la mort ou le
vide spatial), comme si Langgaard s’était trouvé apaisé par la destruction symbolique
de ses semblables.
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