Leevi Madetoja… Ce nom ne vous dit probablement rien et pour
cause : en dehors de sa Finlande natale, ce compositeur est un illustre
inconnu ! Pourtant, les Finnois le considèrent comme leur plus grand symphoniste
après Jean Sibelius, ce qui n’est quand même pas rien... Les deux hommes furent
d’ailleurs contemporains ; ils eurent même l’occasion de travailler
ensemble, Madetoja ayant pris quelques leçons avec son célèbre collègue.
Toutefois, Sibelius ne fut pas son seul professeur : entre 1910 et 1911,
Madetoja s’installa à Paris puis Vienne pour recevoir les enseignements
prodigués par Vincent d’Indy (qu’il ne rencontra pourtant qu’une fois) et
Robert Fuchs. De son séjour en France, le jeune Finlandais retira le goût de la
transparence et de la simplicité. Quant à l’Autriche, elle lui inculqua la
rigueur nécessaire aux grandes formes que sont l’opéra et la symphonie. Des
leçons utiles puisque ces deux genres constituent le cœur de son œuvre,
articulée autour de trois superbes symphonies.
Leevi Madetoja (1887-1947) au sommet de sa gloire |
La Première fut créée en février 1916 à Helsinki ; elle obtint d’emblée un grand succès. Il faut dire qu’elle recèle de grandes qualités mélodiques, associées à une orchestration fine et subtile : un lointain souvenir de la musique française. Toutefois, la Deuxième Symphonie est d’une toute autre envergure ; Madetoja l’écrivit entre 1916 et 1918, alors qu’une terrible guerre civile déchirait la Finlande. Celle-ci le toucha personnellement puisque son frère Yrjö y perdit la vie, abattu par les Gardes Rouges lors de la bataille d’Andrea. Ainsi, Madetoja n’eut guère besoin de forcer sa mélancolie naturelle pour écrire une symphonie sombre et douloureuse. Le ton y est étonnamment contemplatif et résigné, bien qu’on puisse percevoir quelques accents de révolte dans le scherzo, sorte de mouvement mécanique et désespéré. Quoiqu’il en soit, cette symphonie demeure assez introvertie (ce qui la rapproche des œuvres de Jean Sibelius par exemple) et antiromantique, d’une noblesse triste et typiquement scandinave. Sans surprise, cette esthétique raffinée se retrouve dans la Troisième Symphonie, la plus mystérieuse et la plus « française » de son auteur.
Après ce cosmopolitisme discret, Madetoja revint à une inspiration
beaucoup plus nationale dans son chef-d’œuvre lyrique, un opéra intitulé Juha. Ce dernier constitue le testament
musical de l’artiste : miné par l’alcool et une grande tristesse, celui-ci
cessa de composer en 1934 ; son silence dura jusqu’à sa mort treize ans
plus tard.
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