Ollantay est
un chef-d'œuvre appartenant à la première manière, dite nationaliste objective,
d'Alberto Ginastera (1916-1983). Pour construire ce splendide poème
symphonique, le compositeur argentin s'est inspiré de la culture
précolombienne à travers le personnage mythique d'Ollantay.
En effet, la préface de
la partition précise : "l'histoire tourne autour du mythe d'Ollantay, fils
de la Terre, qui s'oppose à Inca, fils du Soleil. Ce dernier déclare la guerre
à Ollantay, qui a profané le temple des Vierges en tentant d'enlever Coyllur,
la fille d'Inca. La tragédie amène le conflit au sein de l'Empire. Ollantay
résiste longtemps à l'intérieur de sa forteresse jusqu'à ce qu'il soit vaincu
et tué". L'œuvre de Ginastera comporte trois mouvements qui s'attachent à
recréer l'atmosphère de la légende, évitant ainsi la simple description. Ainsi,
sa création en 1949 (soit deux ans après sa composition) remporta un succès
bien mérité. De fait, on ne peut qu'apprécier la capacité de ce triptyque à
stimuler l'imagination, grâce à des couleurs et des rythmes typiquement
sud-américains.
Portrait d'Alberto Ginastera (1916-1983) |
ANALYSE SUCCINCTE :
I) Paysage d'Ollantaytambo :
"Ollantaytambo apparaît dans la nuit solitaire d'Ollantaytambo pour évoquer les cris de protestation des cités disparues."
La solitude du héros se traduit par l'entrée d'une flûte solitaire, que rejoignent le cor et le hautbois. L'atmosphère de ce Lento introductif est lourde : le temps semble s'être arrêté sur la forteresse d'Ollantaytambo. C'est alors qu'arrive Ollantay, personnifié par les altos et les violoncelles. Ceux-ci chantent les tristes lamentations du héros, plein de douleur pour les cités en ruines. Au centre du mouvement, les interventions belliqueuses des timbales et des cuivres menacent la quiétude de la nuit. Elles atteignent ensuite un sommet majestueux en forme de fanfare, symbole musical d'une menace sourde. Cependant, la complainte d'Ollantay reprend le dessus et termine ce nocturne dans un calme étouffant.
II) Les guerriers :
"Les guerriers d'Ollantay dansent tout en se préparant pour la guerre. Pleins d'excitation, ils imitent des armées au combat."
C'est sur un rythme régulier à 2/4 que débute ce passage agressif et barbare... De nouveau mises en valeur, les timbales mènent la danse rituelle des guerriers, avant qu'un nouveau motif ne fasse son entrée aux cors et aux violoncelles. Obstiné et martial, celui-ci se propage à travers l'orchestre avant d'aboutir à un passage encore plus vif : les guerriers d'Ollantay trépignent et hurlent leur impatience d'en découdre. Une courte reprise du début amène la coda, marquée Presto e agitato. Ce morceau digne du Sacre se termine brusquement sur quelques coups de timbales, dans une frénésie sanguinaire.
III) La mort d'Ollantay :
"Ollantay, emprisonné par Inca, prédit la destruction de l'Empire et la disparition de la race des fils du Soleil. Ollantay meurt et la solitude envahit les vallées andines."
La musique semble maintenant onduler, comme chancelante. La mélodie plaintive ainsi que la fanfare du premier mouvement sont reprises par les bois et les cuivres, avant d'être développées en un puissant crescendo. Rythmée par les percussions, la prophétie d'Ollantay éclate, péremptoire : l'Empire inca sera détruit. Un solo de flûte à découvert représente de nouveau la solitude du héros. Celui-ci meurt sur une série de coups de timbales, que soulignent la trompette et le gong. La pièce s'achève dans une désolation tranquille, comme une préfiguration de la chute des Incas.
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