mardi 16 janvier 2018

Ernest Chausson ou la tristesse élégante


Né dans une famille d’entrepreneurs parisiens, Ernest Chausson se vit dispenser une très bonne éducation artistique. Cependant, il ne vint que tardivement à la composition, après les études de droit que lui imposait son père. Ce n’est donc qu’à partir de 1880 qu’il suivit les leçons de Jules Massenet au Conservatoire, ainsi que celles de César Franck et de Vincent d’Indy. Ces deux compositeurs austères influencèrent grandement le jeune Chausson, d’un tempérament grave et mélancolique. Ses propres écrits témoignent d’ailleurs de ce malaise, probablement dû à la mort de ses deux frères : « Je suis triste, sans trop savoir pourquoi, mais intimement persuadé que j’ai les meilleures raisons pour l’être ».

Portrait d'Ernest Chausson
Portrait d'Ernest Chausson (1855-1899)

Une biographie n’éclaire pas toujours l’œuvre d’un artiste… Toutefois, la citation précédente s’applique parfaitement à la musique d’Ernest Chausson. En effet, celle-ci est profondément marquée par le spleen des années 1880. En même temps, l’art de Chausson est noble ; la mélancolie du musicien reste altière et retenue. En témoignent ses meilleures œuvres, et en particulier la très wagnérienne Symphonie en si bémol. Largement inspiré du mysticisme germanique, son mouvement central est le chant majestueux et universel d’un homme observant l’abîme… On retrouve ce genre d’ambiance dans le fameux Poème pour violon et orchestre, ainsi que dans Le Roi Arthus, un opéra symboliste que l’on n’entend presque jamais… Il s’agit pourtant du magnum opus de Chausson, une œuvre qu’il a travaillé pendant près de neuf ans !

Toutefois, le compositeur se fait bien plus touchant dans sa musique de chambre et notamment dans son Concert pour violon, piano et quatuor à cordes. Ce dernier constitue le sublime épanchement d’une âme tourmentée et introvertie, pleine de pudeur et de sensibilité (c’est frappant dans la Sicilienne, avec ses rythmes balancés et son évanescente tristesse). Peut-être que le compositeur pressentait une fin prématurée ? Toujours est-il qu’il mourut à l’aube du XXème siècle, dans un tragique accident de vélo. À 44 ans, ce dandy laissait son unique quatuor à cordes inachevé…

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