mercredi 12 juillet 2017

Leoš Janáček : un révolutionnaire sur le tard !


Au même titre que Stravinsky ou Prokofiev, Leoš Janáček (1854-1928) fait partie de ceux qui ont inventé la musique moderne et enterré le romantisme. Mais à l’inverse de ses jeunes collègues, il a attendu plusieurs dizaines d’années avant de révolutionner la musique. En effet, Janáček ne s’est « réveillé » qu’à 65 ans et ses plus grands chefs-d’œuvre furent écrits alors qu’il était un vieillard. Toutefois, ce parcours singulier s’explique aisément puisqu’à l’exception de rares voyages à Vienne ou à Prague, le compositeur demeura isolé dans sa Moravie natale. Il était donc à l’abri de tous les courants « modernistes » et composait des œuvres très académiques.

Portrait de Leoš Janáček

Mais  après quarante ans d’une vie paisible et anonyme, Janáček fut bouleversé par la mort soudaine de sa fille Olga. Ce traumatisme affectif le libéra du joug des traditions musicales dans lesquelles il était empêtré. Tant et si bien qu’après dix ans de recherches, son style était fixé. Ce revirement complet aboutit à une musique étrange car remplie de rythmes heurtés et de mélodies fragmentaires. Par ailleurs, l’orchestration du Janáček de la maturité est reconnaissable entre mille : virile et cuivrée mais jamais lourde, elle fait la part belle aux sonorités acides des bois.

Janáček devint subitement célèbre en 1916 grâce à son opéra Jenůfa. Cette reconnaissance tardive et inattendue (n’était-il pas un obscur notable de province ?) s’accrut encore lorsque la Tchécoslovaquie devint indépendante... Devenu « compositeur national », Janáček enchaîna les chefs-d’œuvre : Taras Boulba en 1918, la Ballade de Blaník en 1920, la Petite renarde rusée en 1923, la Sinfonietta et la Messe glagolitique en 1926. Dans ces deux compositions, le génie si particulier de Janáček est éclatant. En effet, elles sont garnies de fanfares enivrantes, de rythmes irréguliers et de thèmes à la fois solennels et joyeux. En tout cas, ce sont des œuvres d’une vitalité extraordinaire… À tel point qu’on ne peut croire à l’âge avancé de leur créateur ! Mais il faut quand même dire qu’à 75 ans passés, Janáček tombait encore amoureux d’une jeune femme de 40 ans sa cadette ! Blessé par l'indifférence de celle-ci, le compositeur confia son chagrin dans un Second quatuor à cordes, sous-titré « Lettres intimes ». Une belle preuve de jeunesse !

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire