Les Suisses comptent peu de compositeurs connus. Parmi
ces rares célébrités, un se détache tout particulièrement : Ernest Bloch,
né en 1880 à Genève et mort en 1956 aux États-Unis. Influencé par le
postromantisme, Bloch est toujours resté fidèle à la tradition.
Cette vénération pour l’histoire musicale imprègne son Concerto grosso n°1. En effet, cette œuvre rend bien évidemment hommage
à la tradition baroque (le concerto grosso est né à cette époque et a fini par se
transformer en symphonie), incarnée par
Bach et Haendel. Toutefois, il exprime aussi l’amour de Bloch pour les traditions
musicales de son pays, puisque son troisième mouvement est tiré d’une Suite de danses suisses (1899).
Écrit en
1925 et joué l’année suivante à Genève, le Concerto
grosso n°1 (originellement désigné par « Suite pour orchestre à cordes »)
est vite devenu l’une des œuvres les plus célèbres de Bloch.
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Ernest Bloch à sa table de travail en 1917 |
En réalité, c’est surtout le Prélude qui est très connu, car il a été utilisé pour des spots
publicitaires. Il faut dire qu’il est très enthousiasmant et plonge l’auditeur
dans un flot continu d’accords énergiques, sur un rythme volontaire et audacieux.
La pulsation régulière rappelle les œuvres d’Haendel et appartient aux cordes, soutenues
par le piano (celui-ci a un rôle soliste assez réduit). À l’audition, cela
paraît simple… En fait, on imagine très mal la complexité de ce morceau, où les
violoncelles sont parfois divisés en quatre parties et où les rythmes se
superposent.
Le Chant funèbre
suivant produit un énorme contraste : le tempo est lent, les instruments moins
nombreux (sextuor à cordes et piano). Cette déploration est lyrique et d’une
douceur ineffable. Ce n’est pas vraiment triste, mais plutôt recueilli, comme
un songe ou une méditation.
Je l’ai déjà évoqué au début de cet article, le troisième mouvement
incorpore des airs de danse suisses, reconnaissables à leur caractère
sautillant et joyeux. Avec assez peu de moyens, le compositeur parvient à créer une atmosphère particulièrement évocatrice. En effet, à l’écoute, on imagine bien des fermiers qui célèbrent le printemps
dans les Alpes, sur un paysage pastoral.
Comme il se doit, le finale est une apothéose en
forme de fugue, un morceau savant très apprécié au XVIIème siècle (voir les fugues de Bach, considérées comme des sommets du genre). Toutefois,
il ne s’agit pas d’un pastiche inspiré par le style baroque. En effet, le plan
tonal de ce dernier mouvement s’inscrit bien dans le XXème siècle et
évoque le néoclassicisme de Stravinski. Il termine le concerto dans l’ivresse
rythmique, sur une splendide mélodie qui monte au ciel et s’arrête
soudainement.
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