La musique de l'Anglais Ralph Vaughan Williams (1872-1958) est un superbe résumé de l’histoire du XXème siècle : né sous le règne de la reine Victoria, le compositeur a connu tous les soubresauts de l’histoire contemporaine, des Guerres Mondiales aux débuts de la Guerre Froide. Sa musique instrumentale s’en ressent, ses premières symphonies étant encore romantiques de style et de ton (cf la Deuxième, sous-titrée « London ») alors que les dernières sont beaucoup plus modernes et tourmentées.
De fait, le langage musical de Vaughan Williams évolua fortement après
1918. Parti d’un idiome proche de celui d’Edward Elgar, chantre incontesté de
l’Angleterre victorienne, il aboutit à un langage plus personnel et resserré
dans la Pastoral Symphony. Celle-ci
fut inspirée par les champs de bataille de 14-18, que le compositeur connut en
tant que brancardier. Après cette expérience traumatisante, Vaughan
Williams se fit l’écho des angoisses de son temps. Ainsi, ses Symphonies N°4 et N°6 évoquent la guerre et la peur provoquées par le militarisme
nazi. Le finale de la Sixième
représenterait même le feu nucléaire.
Portrait de Ralph Vaughan Williams, par Gerald Festus Kelly |
Ce modernisme apparent n’empêcha pas Vaughan Williams de rester profondément anglais, dans
son inspiration comme dans ses mélodies. En effet, il harmonisa de nombreux chants
populaires britanniques et s’inspira de plusieurs
« folktunes » dans ses symphonies. Cela lui valut d’être considéré
comme le patriarche des compositeurs anglais, et ce dès sa Troisième Symphonie. Une image d’autant plus répandue que Vaughan
Williams s’illustra dans tous les genres (ballet avec Job, A Masque for Dancing, symphonies, poèmes symphoniques, musique
de chambre, messes…), mais à un âge assez avancé ! Il se fit aussi
le défenseur des traditions musicales anglaises face au sérialisme germanique,
n’hésitant pas à qualifier l’atonalité de « ce qu’il y a de pire dans la
musique allemande ». Se méfier des innovations venues du continent, voilà une posture très britannique !
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